Naim Yilmaz
La plupart d’entre nous ont pris, ou du moins interagi avec, des médicaments à un moment ou à un autre de leur vie. Cela peut aller de médicaments en vente libre plus « simples » à des médicaments plus complexes spécialement conçus pour des maladies précises. Compte tenu de l’ère de la Covid-19 que nous traversons actuellement, et du fait que la recherche de nouveaux vaccins est à la vitesse maximale, il est important d’avoir au moins une idée générale sur la façon dont les médicaments sont développés pour notre usage. Cet article vise à explorer comment un mélange complexe de composés chimiques dans un laboratoire se retrouve sous forme de pilules sur une étagère de votre pharmacie locale. Nous explorerons également une histoire courte de la pharmacologie, spécifiquement l’origine des noms des médicaments, la façon dont les médicaments se concrétisent, les divers effets que les médicaments peuvent avoir sur notre corps, les différences entre eux, ainsi que la manière et la raison de leur utilisation.
Pour commencer, la pharmacologie est l’étude des interactions qui se produisent entre un organisme vivant et les produits chimiques qui affectent les fonctions biochimiques normales ou anormales. Il s’agit des sources, des propriétés chimiques, des effets biologiques et des utilisations thérapeutiques d’un médicament. Les substances dotées de propriétés médicinales sont considérées comme des produits pharmaceutiques, tandis que les médicaments administrés à des fins thérapeutiques sont généralement appelés « médicaments ». L’utilisation thérapeutique des médicaments, également appelée pharmacothérapie, est l’utilisation d’un médicament pour prévenir, diagnostiquer et traiter les signes, les symptômes et les pathologies. Lorsque la prévention ou la guérison n’est pas un objectif raisonnable, le soulagement des symptômes peut grandement améliorer la qualité de vie et la bonne capacité de fonctionnement de la personne au quotidien. Connaître ce métier peut nous permettre de mieux comprendre la création des drogues et des médicaments qui parfois changent nos vies, et peut-être même de contempler leur création complexe et leur existence.
Dans sa définition la plus simpliste, un médicament est une substance qui est ingérée ou placée sur le corps afin de guérir une maladie ou un état (par exemple, des antibiotiques sont administrés pour soigner une infection), traiter une affection médicale (des antidépresseurs sont administrés pour traiter la dépression), soulager les symptômes d’une maladie (des analgésiques sont administrés pour réduire la douleur), ou bien pour prévenir les maladies (le vaccin contre la grippe aide à prévenir ses complications).
La source des médicaments
Historiquement, les médicaments étaient principalement dérivés de plantes, d’animaux et de minéraux. La morphine, l’insuline et le fer sont tous des exemples courants de leurs sources respectives. La croyance aux pouvoirs curatifs des plantes et de certaines substances reposait exclusivement sur les connaissances traditionnelles. Mais les informations empiriques n’ont pas fait l’objet d’un examen critique. Jusqu’à la fin du XIXe siècle, les médicaments étaient fabriqués à partir de produits naturels organiques ou inorganiques comprenant principalement des plantes séchées ou fraîches et leurs parties. Ces composés peuvent contenir des substances qui possèdent des propriétés curatives ou des réactions qui exercent un effet toxique. Il est important de se rappeler que de nombreux fruits, légumes et plantes possèdent encore un grand pouvoir bien qu’ils n’aient pas des origines « modernes ».
La plupart des médicaments qu’on utilise aujourd’hui sont des composés chimiques synthétiques fabriqués dans des laboratoires qui sont synthétisés en modifiant la structure chimique d’un médicament déjà existant. La première drogue d’une famille particulière de médicaments s’appelle un prototype. Par exemple, la morphine est le prototype des analgésiques opioïdes et la pénicilline est le prototype des médicaments antibactériens. Les classifications et les prototypes de médicaments sont définis et la plupart des nouveaux médicaments peuvent être attribués à un groupe. Nous devons garder l’espoir en continuant à chercher partout des remèdes pour toutes les maladies, qu’elles soient organiques ou synthétiques, car notre monde est plein de possibilités infinies et de découvertes.
L’origine des noms des médicaments
La dénomination systématique des médicaments pharmaceutiques s’appelle la « nomenclature des médicaments ». Les médicaments ont principalement trois types de noms : les noms chimiques, les noms génériques et les noms commerciaux. Les noms chimiques sont les noms scientifiques qui semblent souvent complexes et sont basés sur la structure moléculaire d’un médicament. Au cours du développement, la société demandera l’approbation réglementaire du médicament auprès d’une agence de réglementation nationale compétente, telle que l’Administration des aliments et des médicaments[1] des États-Unis, et se verra attribuer un nom générique pour celui-ci. Les noms génériques indiquent, via leurs racines, à quelle famille de médicaments appartient le médicament. Par exemple, l’oseltamivir est un médicament antiviral parce que son nom se termine par le suffixe –vir.
Après le développement, les essais et l’acceptation réglementaire d’un médicament, la société pharmaceutique lui donne un nom commercial, ce qui est l’expression en usage dans l’industrie pharmaceutique pour le nom de marque ou la marque déposée. Beaucoup de médicaments ont plusieurs noms commerciaux, qui peuvent correspondre à des stratégies de commercialisation qui diffèrent selon les pays, être fabriqués par différentes sociétés, ou les deux.
Une enquête sur le médicament
Une nouvelle enquête sur les médicaments constitue le début du voyage qui va faire d’un composé chimique un médicament utilisé en clinique. Le processus des essais cliniques d’un composé chimique commence par des études sur des animaux afin de déterminer les utilisations bénéfiques potentielles, ainsi que les effets secondaires toxiques potentiels du composé. Les résultats de ces études animales sont examinés, et s’ils sont satisfaisants, le composé subit des essais cliniques chez l’être humain auxquels les gens peuvent s’inscrire volontairement. La plupart des essais cliniques utilisent la méthode d’une conception expérimentale randomisée et contrôlée qui implique la sélection des sujets selon les critères établis, l’assignation aléatoire des sujets à des groupes expérimentaux et l’administration du médicament à l’essai sur un groupe et d’une substance témoin sur un autre groupe.
La protection du patient
Les nouveaux médicaments développés par les sociétés pharmaceutiques seront couverts par la protection des brevets. Cela signifie que seule la société pharmaceutique qui détient le brevet est autorisée à fabriquer, commercialiser et éventuellement tirer des profits du médicament. Cela est considéré comme un retour sur investissement de l’entreprise qui a développé le médicament. Ce processus peut nécessiter des années de travail et des millions de dollars d’investissement, ainsi qu’une incitation à développer d’autres médicaments. Pendant toute la durée de son brevet, le médicament ne peut être fabriqué ni commercialisé par les autres sociétés pharmaceutiques.
En règle générale, aux États-Unis, le brevet d’un médicament est accordé pour une vingtaine d’années, mais selon les pays et les médicaments le nombre d’années varie. Les sociétés pharmaceutiques déposent une demande de brevet bien avant le début de la période d’essai clinique. Une fois l’approbation du médicament obtenue, la période de validité du brevet est souvent de sept à douze ans environ. À l’issue de cette période, le médicament peut être fabriqué et vendu par d’autres sociétés. Il est alors appelé « générique », et doit être thérapeutiquement équivalent tout en étant bien meilleur marché que le médicament de marque.
La pharmacoéconomie
La pharmacoéconomie implique tous les coûts accumulés en raison de la pharmacothérapie et de l’expérimentation, y compris ceux liés à l’achat de fournitures, à la distribution du médicament, à son stockage, aux frais administratifs, aux tests laboratoires et autres qui sont utilisés pour surveiller les réponses des patients et les pertes consécutives à l’expiration du brevet. La durée de la maladie ou de l’hospitalisation d’un patient est également prise en compte. Alors que le facteur le plus important est la santé du patient, les coûts du traitement sont de plus en plus considérés comme un facteur majeur lors du choix des médicaments. Les projets de recherche comparant les coûts ont considérablement augmenté ces dernières années. L’objectif est de permettre aux patients de choisir plus facilement les médicaments les plus rentables qui combinent un traitement de haute qualité et un prix abordable. Pour des médicaments ou des schémas thérapeutiques d’efficacité et de toxicité similaires, les médecins et les pharmacies sont soumis à une pression considérable pour prescrire des médicaments moins coûteux pour une durée plus courte.
Médicaments sur ordonnance et sans ordonnance
Dans de nombreux pays, les consommateurs ont deux voies légales d’accès aux médicaments thérapeutiques. La première option implique une ordonnance ou une prescription de la part d’un fournisseur de soins de santé agréé, tel qu’un médecin, un dentiste ou une infirmière praticienne. La deuxième option est l’achat d’un médicament en vente libre, sans ordonnance. Ces deux voies sont réglementées par diverses lois sur les médicaments et elles changent d’un pays à l’autre. Il est illégal d’acquérir et d’utiliser des médicaments sur ordonnance à des fins non thérapeutiques, par des personnes qui ne sont pas autorisées à les posséder ou à qui ils ne sont pas prescrits.
Le rejet des médicaments dans la société moderne
Même de nos jours, certaines personnes refusent de suivre un traitement du fait de leurs croyances religieuses. Cette catégorie de personnes ne représente qu’une minorité, car la majorité des religions préconise que les gens soient en bonne santé et prennent soin de leur santé autant qu’ils le peuvent. Dans presque toutes les traditions de croyance, le corps humain est considéré comme un dépôt confié et, en cas de maladie, les méthodes de traitement les plus appropriées et les plus rapides doivent être utilisées. Même les substances qui ne sont normalement pas autorisées sont utilisées si l’intégrité physique de la personne est en jeu. Pour les croyants, le but le plus important dans la vie est d’adorer Dieu, et pour que la chose soit possible, le corps doit être en bonne santé.
Un jour, les gens ont demandé au Prophète Muhammad, que la paix et la bénédiction de Dieu soient sur lui : « Devrions-nous nous soigner ? » Il répondit : « Soignez-vous car Dieu a assigné un remède à chaque maladie sauf une : la vieillesse. »
Les gens sont encouragés à rechercher ces remèdes et à les utiliser avec compétence et bienveillance. Rappelons-nous aussi que Jésus, que la paix soit sur lui, était très actif dans son ministère de guérison. Il a, avec la permission de Dieu, montré des miracles en guérissant les aveugles et les sourds et en ramenant les morts à la vie. Ainsi, loin de refuser le recours à toutes les méthodes de traitement disponibles, les religions encouragent-elles fortement le traitement comme la prévention des maladies.
Les religions sont également bien connues pour traiter le stress, qui fait des ravages sur le corps et l’esprit. On ne sait pas toujours comment le stress affecte notre santé, mais les chercheurs ont découvert que le stress psychologique chronique est associé à la perte de la capacité du corps à réguler la réponse inflammatoire. Il a été démontré que les effets du stress psychologique sur la capacité du corps à réguler l’inflammation peuvent favoriser le développement et la progression de la maladie. Or nous savons que les religions et les croyances donnent de l’espoir aux gens, diminuant ainsi considérablement le stress.
L’être humain est la création la plus précieuse, et la santé lui est nécessaire pour atteindre le but de son existence. Le recours à la médecine scientifique de concert avec la foi et la religion peut aider les gens à préserver leur santé. Parce qu’elle est la science des médicaments et qu’elle explore sans cesse de nouvelles thérapies médicamenteuses, la pharmacologie nous est à cet effet d’un précieux secours.
Brève chronologie de la pharmacologie
Claude Galien (129-200). — Il a été le premier à chercher à définir le contexte théorique de la pharmacologie.
‘Alī al-Tabarī (838). — Les médecins musulmans du Moyen âge utilisaient des substances naturelles telles que le Papaver somniferum Linnaeus ou pavot, et le Cannabis sativa Linnaeus ou chanvre comme source de médicaments. Bien que le pavot ait des bienfaits médicinaux, ‘Alī al-Tabarī a expliqué que l’extrait de feuilles de pavot était mortel et que les extraits comme l’opium devaient être considérés comme des poisons.
Théophraste de Hohenheim (1493-1541). — Également connu sous le nom de Paracelse, Théophraste de Hohenheima commencé à remettre en question les doctrines de l’Antiquité. Il prescrit des substances chimiquement définies avec un tel succès que ses adversaires le font poursuivre pour empoisonnement. Il s’est défendu contre toutes ces accusations avec une thèse qui est devenue un axiome de la pharmacologie : « Si vous voulez interpréter correctement tout poison, qu’est-ce qui n’est pas poison ? Tout est poison et rien n’est sans poison ; seule la dose fait qu’une chose n’est pas un poison. »
Johann Jakob Wepfer (1620-1695). — Il a été le premier à utiliser l’expérimentation animale pour des actions pharmacologiques ou toxicologiques.
Rudolf Buchheim (1820-1879). — Il a fondé à l’Université de Dorpat (Tartu, Estonie) en 1847 le premier institut de pharmacologie, qui est à l’origine de la pharmacologie comme discipline scientifique indépendante. En plus d’une description de leurs effets, Buchheim a réussi à expliquer les propriétés chimiques des médicaments.
Oswald Schmiedeberg (1838-1921). — Il a contribué, avec ses nombreux disciples, à établir la haute réputation de la pharmacologie. Il s’est associé avec le pathologiste Bernhard Naunyn (1839-1925) pour fonder la première revue de pharmacologie, qui a été publiée sans interruption depuis.
Après 1920, l’industrie de la pharmacologie disposait de ses propres laboratoires qui n’étaient plus dès lors le seul fait des instituts universitaires. Après 1960, des départements de pharmacologie clinique ont été créés dans de nombreuses universités comme dans l’industrie.
Références
Anne Collins Abrams & Tracey L. Goldsmith (2003), Clinical Drug Therapy: Rationales for Nursing Practice [Thérapie médicamenteuse clinique : justifications de la pratique infirmière, NdT], Lippincott Williams & Wilkins, Philadelphie.
Bertram Katzung, Susan Masters & Anthony Trevor (2012), Basic and Clinical Pharmacology [Pharmacologie fondamentale et clinique, NdT], McGraw Hill Education, New York.
Charles R. Craig & Robert E. Stitzel (2006), Modern Pharmacology with Clinical Applications [Pharmacologie moderne avec applications cliniques, NdT], Lippincott Williams & Wilkins, Philadelphie.
[1] Food and Drug Administration/FDA (NdT).