Brian Turk
Si notre corps est comparable à un vaisseau spatial d’une valeur inestimable, doté d’une sophistication extrême, il est logique qu’il soit doté d’un système d’alarme et de détection précoce avancé et détaillé, surveillé en permanence par d’innombrables écrans dans le centre de commandement du vaisseau.
Dans cet article
- Ne serait-il pas merveilleux de ne jamais ressentir la douleur ? Pourquoi existe-t-elle ?
- L’humanité n’a pas encore inventé de système d’alarme médical plus performant et plus précis que la douleur.
Nous sommes bombardés de centaines, voire de milliers, de « signaux » au quotidien, comme les notifications téléphoniques ou les publicités télévisées. Ces signaux sont conçus pour attirer notre attention, mais nous y sommes tellement habitués que nous finissons souvent par les ignorer. Imaginez une alarme incendie assourdissante ou une fuite de gaz nauséabonde. Difficile à ignorer, n’est-ce pas ? Cela signifie qu’ils ont été bien conçus, puisqu’ils servent à vous avertir d’un danger imminent.
Pour beaucoup, la simple lecture du mot « douleur » peut évoquer des souvenirs ou des émotions désagréables. Ne serait-ce pas merveilleux de ne jamais ressentir de douleur ? Pourquoi existe-t-elle ? Eh bien, comme dans les exemples précédents, la douleur est le système d’alarme du corps que nous ne pouvons ignorer et dont nous devrions être reconnaissants. Notre cerveau est un système complexe qui reçoit et envoie d’innombrables signaux chaque seconde et qui communique en permanence avec chaque recoin du corps. Dès qu’un organe est en détresse, il alerte le cerveau. À son tour, le cerveau donne la priorité à cet organe en renvoyant un signal spécialisé, que nous percevons comme de la douleur.
Examinons de plus près la transmission du signal de douleur et sa destination. Tout comme nos sens du toucher et de la température, la douleur est transmise par les neurones de la moelle épinière, connectés aux centres de la douleur dans le cerveau. Les deux principaux types de fibres nerveuses impliquées dans la transmission des signaux de douleur sont les fibres nerveuses de type A et de type C. Les fibres nerveuses de type A sont plus grosses et recouvertes d’une substance isolante électrique appelée myéline. Ces caractéristiques permettent une transmission très rapide du signal de douleur. La douleur ressentie lorsque ces nerfs sont stimulés est rapide et vive, comme celle d’une coupure. Les fibres nerveuses de type C sont plus fines et ne sont pas isolées électriquement, ce qui ralentit la propagation des signaux de douleur. La douleur ressentie lorsque ces nerfs sont stimulés est lente et sourde, comme celle d’une contusion.
Branché pour une action rapide
Les différentes structures des fibres nerveuses provoquent différents types de douleur ; cependant, leur câblage est encore plus fascinant ! Si une partie de ces fibres nerveuses remonte jusqu’au cerveau pour produire la sensation de douleur, une autre partie se connecte directement à un autre ensemble de fibres nerveuses de la moelle épinière qui contrôlent nos muscles. Cela crée un court-circuit qui nous force à écarter notre membre de la source de douleur, comme lorsque nous touchons un objet chaud. Cette décision n’est pas prise par le cerveau et échappe à notre contrôle. Ce réflexe est donc appelé « réflexe médullaire » et peut survenir même chez les patients diagnostiqués en état de mort cérébrale ! Notre corps est programmé pour déclencher des actions rapides et décisives qui nous protègent du danger.
L’humanité n’a pas encore inventé de système d’alarme médicale plus performant et plus précis que la douleur. Une personne souffrante ne peut ni travailler, ni manger, ni dormir. Elle est prête à tout pour soulager sa douleur. Bien que les analgésiques puissent apporter un soulagement temporaire, la douleur persiste tant que le problème n’est pas résolu. C’est pourquoi les personnes souffrantes finissent par consulter un médecin. Même si cela peut paraître cruel, la douleur est la meilleure amie du médecin. Dans la plupart des cas, elle leur indique précisément ce qui ne va pas. Une alarme incendie ne peut pas vous indiquer où se trouve le feu ; elle vous indique seulement qu’il existe. La douleur a bien plus à offrir. Il existe de nombreux types et qualités de douleur, dont certaines sont extrêmement spécifiques à certaines pathologies. Examinons quelques causes courantes de douleur et voyons comment une souffrance passagère peut prévenir des conséquences permanentes.
Commençons par la douleur la plus familière : le mal de tête. Dans la plupart des cas, les maux de tête sont des désagréments légers causés par le stress. Ces maux de tête légers mettent en évidence les facteurs de stress qui stressent notre corps, comme le surmenage, les bruits forts ou les lumières vives. Les personnes tirent des leçons de leurs maux de tête et commencent à éviter ces facteurs de stress, prévenant ainsi des dommages corporels à long terme. Dans les cas plus extrêmes, cependant, les maux de tête peuvent être le premier symptôme d’un problème plus grave. Des maux de tête persistants et intenses justifient généralement des examens complémentaires et peuvent aider les médecins à détecter une hypertension artérielle ou des masses cérébrales à un stade précoce.
Une autre source fréquente de douleur est le ventre. Les douleurs abdominales se présentent sous toutes les formes et de toutes les tailles ; elles peuvent être aiguës, douloureuses ou accompagnées de crampes. Elles peuvent être localisées à un endroit précis ou généralisées. Elles peuvent même se déplacer ! Notre ventre abrite la plupart de nos organes, chacun ayant sa propre « signature douloureuse ». Un appendice sur le point d’éclater commence par une douleur généralisée dans le ventre, qui se localise ensuite jusqu’à devenir une douleur aiguë dans le coin inférieur droit. Une vésicule biliaire encombrée de calculs est plus soudaine et plus constante ; elle signale le coin supérieur droit et reste immobile. Un estomac douloureux signale le coin supérieur moyen ; des intestins tordus signalent le coin inférieur gauche ; et des reins obstrués signalent les côtés. Pour le commun des mortels, tout cela n’est qu’un « mal de ventre ». Mais pour les médecins, ces signes de douleur sont une fenêtre sur votre intérieur et aident à prévenir une catastrophe.
La fin imminente !
Notre dernier exemple est probablement le plus redouté, et pour cause : la douleur thoracique. Même si la poitrine n’abrite pas autant d’organes que le ventre, ceux qui y résident sont les plus vitaux, notamment le cœur. La douleur irradiée par un cœur assoiffé d’oxygène est unique. Soudain, vous avez l’impression qu’un éléphant est assis sur votre poitrine, et cette sensation peut s’étendre aux bras ou au cou. Cette douleur s’accompagne généralement d’un essoufflement et d’un sentiment de fin imminente (oui, c’est un vrai terme médical !). L’intensité de la douleur est proportionnelle à la gravité de l’affection, et toute personne signalant ce type de douleur thoracique sera prise au sérieux à l’hôpital. Généralement, on trouve un vaisseau sanguin obstrué dans le cœur, qui est alors ouvert ou ponté, ce qui met fin à la douleur. Si elle est réalisée suffisamment tôt, cette intervention peut prévenir une crise cardiaque mortelle imminente.
Si notre corps est comparable à un vaisseau spatial d’une valeur inestimable, doté d’une sophistication extrême, il est logique qu’il soit doté d’un système d’alarme et de détection précoce perfectionné et détaillé, surveillé en permanence par d’innombrables écrans dans le centre de commandement. Si un moteur est sur le point de tomber en panne, un signal s’affiche sur un écran ; si le carburant est sur le point de manquer, un autre écran le détecte ; si la pression atmosphérique dans l’habitacle est inférieure ou supérieure à celle souhaitée, un autre écran vous envoie un message ; si un train perd de l’adhérence, un autre écran vous permet de savoir précisément de quel train il s’agit parmi des milliers. N’est-il pas évident que nous avons la chance de posséder un corps aussi merveilleux, dont l’entretien et l’utilisation sont une tâche ardue ?

